Le Quotidien d'Oran, mercredi 23 janvier 2014
Akram Belkaïd, Paris
Un contexte d’incertitude politique qui a empêché la mise
en œuvre de réformes structurelles, « notamment celle du système des
subventions qui atteignent 4 milliards de dollars pour les produits
alimentaires de base (blé et poudre de lait) ». C’est le constat dressé
par le quotidien Le Monde dans son
bilan annuel des économies de la planète (*). Sous la signature d’Amir Akef, l’article
rappelle quelques vérités crues qui devraient normalement alimenter le débat
lors de la campagne électorale pour la présidentielle d’avril prochain.
Dépenses publiques qui dérapent
Au-delà de la question de la nature même du système
politique, le gouvernement algérien est, en effet, responsable d’une dérive
inquiétante des dépenses publiques. Certes, il ne s’agit pas de plaider pour un
retrait total de l’Etat ou pour une stratégie de choc comme l’ont connu
certains pays de l’ex-bloc communiste d’Europe de l’Est. Mais avec 4 milliards
de dollars de subventions alimentaires – qui profitent le plus à ceux qui, en
réalité n’en ont pas besoin – et 10 milliards de dollars de subventions « implicites »
en matière d’énergie, l’Algérie gaspille de précieuses ressources qui
pourraient lui faire défaut dans un avenir proche. « Si les dépenses de l’Algérie
continuent sur le même rythme, le taux d’endettement du pays pourrait dépasser
100% du PIB à l’horizon 2050, indique le FMI » rappelle le Bilan du Monde qui précise que « la
loi de finances 2014 ne prend pas en compte » les appels à la prudence de
l’institution financière. Ainsi, « la dépense publique sera en hausse de
11,3% par rapport à 2013 » tandis que le déficit budgétaire devrait
atteindre 45 milliards de dollars.
Les années 2000, celles donc de la présidence Bouteflika,
auront vu la mise en place d’un mécanisme assez rudimentaire pour dépenser plus
d’argent public et financer le déficit qui résulte de ces excès. Cela consiste
à établir des budgets sur la base d’un prix du baril peu élevé et loin des
sommets atteints par le marché (37 dollars contre une fourchette moyenne
comprise entre 80 et 100 dollars). Alimentant le Fonds de régulation des
recettes (FFR), la différence permet donc de combler le déficit et, comme le
mentionne le Bilan du Monde, de
masquer « le fait qu’environ 75% des recettes fiscales de l’Etat viennent
des hydrocarbures, la part de la fiscalité ordinaire étant des plus réduites ».
Vers un retour à l’endettement
Ce constat démontre que l’une des urgences de l’Algérie
en matière de réforme économique est de moderniser la manière dont le budget
est conçu. Ce dernier ressemble aujourd’hui à une série de dispositions dont
tout le monde sait qu’elles ne seront pas respectées du fait de l’existence d’un
fonds d’ajustement dont la gestion échappe au contrôle parlementaire. Certes,
cela peut donner quelques années d’intense activité grâce à la profusion de
dépenses publiques. Mais le retour de bâton peut être très violent. Dans les
années 1980, seuls quelques initiés au sein de la machine étatique savaient que
le pays se dirigeait vers une catastrophe financière. Aujourd’hui, nul ne peut
ignorer le fait que l’Algérie risque de faire appel au Fonds monétaire
international (FMI) d’ici 2025, c’est-à-dire demain. A ce moment-là, les 206
milliards de dollars de réserves de change auront fondu comme neige au soleil
et l’endettement extérieur sera de nouveau une obligation. Et l’on sait ce que
cela a toujours provoqué comme dérapages sanglants en Algérie. Il faudra parler
de cela aussi durant la campagne électorale.
(*) Le bilan du
Monde, économie et environnement (avec l’atlas de 193 pays), 9,95 euros.
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