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jeudi 22 octobre 2020

La chronique économique : SUV honnis

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Le Quotidien d’Oran, mercredi 14 octobre 2020

Akram Belkaïd, Paris

 

Ils sont les vedettes des ventes d’automobile mais le cauchemar des écologistes, des piétons et des cyclistes. Alors que la question de la lutte contre le réchauffement climatique est au centre de la majorité des discours politiques, les SUV (« Sport Utility Vehicles » ou « véhicules utilitaires sport ») figurent en tête des ventes d’automobiles en Europe et en Amérique du nord. En France, rappelle le Fonds mondial pour la nature (WWF), ils ne représentaient que 5% des ventes de voitures neuves en 2008. Désormais, ils atteignent près de 40% du marché et la tendance demeure haussière au point que, en se basant sur les chiffres actuels, WWF estime qu’ils pourraient concentrer les deux tiers des ventes à court terme. Ce faisant, l’ONG dénonce, dans une étude publiée début octobre, « l’impact écrasant des SUV sur le climat »

 

Dangereux pollueurs

 

Car le problème principal, c’est que ces véhicules sont plus polluants que les berlines classiques. A mi-chemin entre la voiture standard et les véhicules tous terrains (4x4), les SUV consomment plus et émettent donc 20% de gaz à effet de serre (ges) en plus. « Les 4,3 millions de SUV vendus en France en une décennie ont une empreinte carbone équivalente à 25 millions de citadines électriques », précise WWF qui rappelle que ces véhicules sont la deuxième cause de réchauffement climatique derrière le transport aérien. Pour l’ONG, il est donc urgent que les pouvoirs publics prennent des mesures pour inciter les consommateurs à acheter autre chose, notamment un véhicule électrique. A condition, toutefois qu’il ne s’agisse pas d’un SUV électrique, le bilan carbone dans la fabrication de ce dernier posant des problèmes sans compter le fait qu’il a besoin de plus de batteries, et donc plus d’électricité, pour rouler.

 

L’une des pistes qu’avancent les détracteurs des SUV serait de les taxer plus fortement et de les exclure des dispositifs d’aide à l’acquisition d’un nouveau véhicule (prime à la casse, prêt bonifié, etc.). Le débat commence à peine mais des élus écologistes envisagent même d’interdire ces voitures dans le centre-ville, là où leur présence pose souvent des problèmes d’encombrement mais aussi de sécurité pour les piétons, les cyclistes et les utilisateurs de trottinettes électriques. Un choc avec un SUV a deux fois de chances de déboucher sur des conséquences dramatiques qu’un véhicule standard.

 

Représailles

 

L’engouement des consommateurs pour les SUV est emblématique d’une certaine schizophrénie de notre monde. Hauts, puissants, ces véhicules fournissent une impression de sécurité et de puissance qui rassurent le conducteur et lui procurent un sentiment d’accomplissement. Qu’importent donc le climat et la sécurité des autres usagers. Contre ce type d’égoïsme, les arguments écologiques ne servent à rien et mieux vaut s’en remettre à une fiscalité punitive voire à une interdiction pure et simple. Cela avant que les choses ne dégénèrent un jour. En France, un collectif nommé La Ronce appelle déjà, mode d’emploi à l’appui, à dégonfler les pneus des SUV…

 

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