Lignes quotidiennes

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Dernier ouvrage paru : L'Algérie en 100 questions. Un pays empêché (Tallandier, 2019)

lundi 17 mars 2025

Hommage à mes parents

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Fadhila Ayari (14 juillet 1940 – 4 décembre 2024)
Mohammed Belkaïd (15 février 1939 – 8 mars 2025)

Mes parents, paix à leurs âmes, se sont mariés en 1963 à Tunis.
La vie, l’usure du temps, les aléas ont fait diverger leurs routes.
Aujourd’hui, il me plaît d’imaginer qu’une partie de scrabble les réunit, l’une de ces joutes (avec revanche, belle et consolante) qui nous captivaient et nous inquiétaient à la perspective de l’inévitable mauvaise humeur du perdant.
Ma mère aimait Saliha, Ismahane, Jacques Douai, Gérard Philipe, la littérature, les livres, les mouwachahat, The Platters, la Palestine et les Palestiniens, son père – homme attaché à sa terre du Tell tunisien-, ses élèves, bons ou mauvais, les mosaïques d’Essers, sa ville natale, et les chevaux. Elle détestait corriger les copies.
Mon père aimait Ténès, sa ville natale, la langue arabe, la linguistique, les Cadets de la Révolution, les déclinaisons latines, la socio de Bourdieu, Fausto Coppi (et Gino Bartali), Audrey Hepburn et Taha Hussein, les chansons potaches du lycée de Ben Aknoun, les Mu'allaqāt, Ahmed Wehbi, Jean Ferrat et Charles Aznavour. Il détestait corriger les copies.
Tous les deux ont appartenu à une génération exceptionnelle de femmes et d’hommes. Celle qui a eu l’immense charge de prendre les choses en main à l’indépendance. Un seul mot d’ordre : bâtir un pays. Il leur fallait éduquer, transmettre, organiser, imaginer, former des cadres, créer des institutions et des infrastructures. Construire. On n’imagine pas ce que cette génération de patriotes a affronté comme défis en partant de rien ou presque. Gardons cela à l’esprit en espérant vivre le jour où il sera temps de refonder notre pays, qu’il s’agisse de l’Algérie ou la Tunisie.
L’absence de mes parents est un abysse mais ainsi va la vie.
Il n’y a pas d’âge pour entrer dans la vaste confrérie silencieuse des orphelins. (*)
Nous sommes à Dieu et à Lui nous revenons.

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(*) Merci à Katya Berger et à Arezki Metref d’avoir inspiré cette phrase.