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J'invite les lecteurs algériens à méditer cet extrait d'une note de lecture rédigée par José Antonio Garcia Simon dans Le Monde Diplomatique du mois de décembre 2014 à propos du roman "Les Nombres", de Viktor Pelevine (*), un roman dont le personnage principal est un oligarque russe.
"Réalisme ? Cynisme ? Non, capacité d'adaptation. La marque de fabrique de l'oligarque, point de condensation des rapports tendus entre l'Etat et la société russes. D'un côté, un sentiment de liberté absolue, d'impunité même, dans les actes quotidiens; de l'autre, la peur diffuse, confinant à la paranoïa, de voir soudain le monde s'effondrer à la suite d'un mot déplacé sur le pouvoir. Car l'engrenage de la domination totalitaire a la vie dure : surveillance, chantage, élimination. L'autocensure s'érige en norme, l'idiotie devient une échappatoire. Cet abêtissement conduit à la réduction de la religion à la superstition, de l'art au spectacle. Avec l'argent comme valeur suprême, la nouvelle classe de nantis devient schizophrène, voltige de l'euphorie à l'étouffement. A l'image du pays depuis la fin du communisme, dont on ne sait s'il est en liberté conditionnelle ou s'il purge une peine en sursis. Une farce sinistre."
(*) Traduit du russe par Galia Ackerman et Pierre Lorain, Alma, Paris, 2014, 388 pages, 19 euros.
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