Le Quotidien d'Oran, mercredi 10 décembre 2014
Akram Belkaïd, Paris
On attendait cela pour
2020, mais c’est finalement cette année que cela intervient. En 2014, le
Produit intérieur brut (PIB) chinois exprimé en parité de pouvoir d’achat (ppa)
devrait devancer celui des Etats-Unis avec 17 632 milliards de dollars
contre 17 416 milliards de dollars. Ces calculs proviennent du site
d’informations financières MarketWatch qui a exploité les données récentes
publiées par le Fonds monétaire international (FMI). Pour mémoire, la Chine
avait déjà dépassé les Etats-Unis dans la catégorie du PIB exprimé à prix
constants (c'est-à-dire hors des effets de l’inflation) en 2011.
Une première
place à relativiser
Quelle importance faut-il
accorder à ce classement qui fait donc de la Chine la première puissance économique
du monde ? La réponse est simple : pas grand-chose sauf à chercher un
beau prétexte à manchettes de presse ou bien de la matière pour alimenter la
sinophobie à laquelle on assiste en Europe (pas une semaine sans que des
magazines ne tirent l’alarme sur la Chine qui veut dominer le monde…). Bien
sûr, cela reste un symbole puissant que de dépasser les Etats-Unis. Mais il
faut savoir de quoi l’on parle. Certes, le PIB exprimé en ppa est un assez bon
indicateur car il cherche à comparer de la création de richesse rapportée à ce
qui serait un même pouvoir d’achat (un peu comme le fameux indice « big
mac » qui compare le prix du hamburger dans chacun des pays où la fameuse
marque de restauration rapide est implantée). Mais on peut objecter qu’il est
aussi utile de comparer les PIB par tête d’habitant, les Etats-Unis demeurant
alors largement la tête et la Chine, avec son milliard et demi d’âmes, ne
pointant qu’à la 89ème place…
De fait, ce genre de
classement est aussi l’occasion de pointer du doigt les insuffisances qui
concernent le PIB. Pour faire vite et trouver un synonyme, cet acronyme est
souvent remplacé par l’expression « création de richesses ». Or, le
PIB n’est pas toute la richesse. D’abord, il rend imparfaitement compte de
l’activité non-marchande tandis qu’il inclut, on ne le répétera jamais assez,
des « richesses » qui résultent de la destruction irrémédiable de
l’environnement. Dans le cas du duel entre les Etats-Unis et la Chine, il est
aussi nécessaire de prendre en compte d’autres indicateurs. Le niveau de
pauvreté et d’inégalités, l’illettrisme, les différents niveaux d’éducation et
le nombre de diplômés, les statistiques sanitaires, le nombre de brevets
déposés par an, tout cela doit aussi contribuer à déterminer qui est la vraie
première puissance économique, ce que restent les Etats-Unis et de loin. Enfin,
on relèvera que la puissance économique ne vaut parfois que par sa possibilité
de s’adosser à une puissance militaire. Et pour l’heure, l’Amérique demeure
championne en la matière même si le budget de la défense en Chine progresse à
des taux annuels parfois supérieurs à 10%.
Le match du
XXIème siècle
Une chose est certaine, la
rivalité est partie pour durer. Où en seront les deux compétiteurs en
2050 ? Personne aujourd’hui n’est capable de le prédire même si avec une
démographie sans cesse vivifiée par l’apport des migrants, les Etats-Unis se
sont donnés les moyens de continuer à rivaliser avec une Chine en plein essor.
Certains experts estiment que c’est sur le plan des budgets militaires que la
bataille va être la plus âpre, d’autres parient sur une course à l’excellence
technologique (Pékin vient de décider de s’engager encore plus dans la conquête
spatiale) tandis que les économistes comptent les coups dans la lutte encore
balbutiante entre le dollar et le yuan. Le match ne fait que commencer…
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