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Le Quotidien d’Oran, jeudi 18
février 2016
Akram Belkaïd, Paris
A bien des égards, la situation en
Syrie peut paraître des plus compliquées en raison de l’intervention de
plusieurs forces extérieures à commencer par la Russie. Mais, une chose est
certaine. Bachar al-Assad, quoiqu’en disent ses défenseurs et ses thuriféraires,
est d’abord un criminel qui massacre son peuple. C’est le point de départ de
toute réflexion, de toute approche de la question syrienne. Si l’on n’est pas
d’accord sur ce point, il ne sert à rien de débattre ou de poursuivre la
discussion. Je lis et j’entends régulièrement que l’homme, son régime et même
son pays sont les victimes et qu’ils ont été agressés en premier. C’est faux.
Il faut rappeler, encore et encore, que les premières manifestations en mars
2011 étaient pacifiques (salmiya) et
que c’est le pouvoir d’Assad qui a œuvré à ce que la contestation soit
confisquée par des groupes violents composés d’individus dangereux qu’il a
lui-même relâché de ses propres prisons.
Assad, comme ce fut le cas pour son
père, ou comme d’autres dictateurs, du monde arabe ou d’ailleurs, n’a guère de
respect pour la vie humaine. Il applique même cette bonne vieille règle de la fin qui justifie les moyens ou celle,
bien connue par les militaires, qui stipule qu’il n’existe pas d’opération
neutre et qu’un pourcentage de victimes, y compris collatérales est inévitable.
Il y a quelques années, le diplomate algérien Lakhdar Brahimi avait mis en
garde Assad contre son jusqu’auboutisme et avait insisté sur le fait qu’il
risquait, in fine, d’être forcé de
quitter le pouvoir. « Alors, Damas brûlera » aurait répondu le
président syrien. Autrement dit, peu importe que des centaines de milliers de
Syriens soient morts et que près de 4 millions d’entre eux aient été jetés sur
les routes de l’exil. Ce que veut Bachar, c’est durer et l’intervention russe
lui permet cela. Pire, elle le pousse désormais à envisager l’impensable, c’est
à dire la reconquête de tout le pays.
Parlons maintenant de la Russie.
Evoquant l’intervention de l’aviation russe notamment dans le nord-ouest syrien,
un diplomate occidental m’a fait la réflexion suivante : « il est
étrange que les articles de presse sur l’action de la Russie en Syrie ne
fassent presque jamais le lien avec ce qui se passe en Ukraine et avec
l’augmentation massive de moyens humains et techniques que l’Otan vient de
décider pour ses installations en Europe ». Et d’ajouter, en parlant du
Secrétaire d’Etat américain John Kerry et du ministre des affaires étrangères
russe Sergueï Lavrov : « croyez-vous vraiment qu’ils ne parlent que
de la Syrie lorsqu’ils se rencontrent à Genève ? ». De fait, il est
impossible de comprendre l’implication russe dans le théâtre syrien si l’on
n’étend pas sa réflexion à l’Ukraine où le statu quo est de mise entre le
gouvernement et les factions de l’est proches de Moscou. Impossible aussi de ne
pas prendre en compte les sanctions européennes à l’encontre de la Russie. Des
sanctions qui ont été non seulement maintenues mais alourdies.
Alors, la Russie fait-elle la guerre
en Syrie parce qu’elle souhaite garder un allié au Proche-Orient et qu’elle
refuse d’envisager de perdre l’accès à la base maritime de Tartous ? C’est
certain. Mais on peut aussi se dire qu’elle intervient contre les opposants à
Assad parce qu’elle ne peut mener de guerre aussi ouverte en Ukraine. En clair,
parmi les éléments qui pourraient modifier la donne concernant la question
syrienne, c’est qu’un « effort » occidental, donc des concessions,
sur le dossier ukrainien pourrait modifier la donne et le rapport de forces en
Syrie. Bien sûr, il ne s’agit pas de tomber dans le piège du raccourci mais on
peut aussi estimer que c’est la confrontation Occident-Russie en Ukraine qui
est, d’une certaine manière, responsable de la prolongation des malheurs du
peuple syrien (sans l’intervention de Moscou, le régime d’Assad serait tombé
depuis bien longtemps). Pour reprendre un terme d’échec, la stratégie de
Poutine est donc de proposer un « gambit », soit le sacrifice d’une
pièce à ses rivaux de l’ouest. Offensive à tout va en Syrie, usage d’une force
disproportionnée, escalade possible avec la Turquie : tout cela force les
membres de l’Otan, Etats Unis en tête à réfléchir à ce qu’il pourraient
abandonner. Selon le diplomate évoqué précédemment, Vladimir Poutine entend
d’abord réinstaurer l’équilibre antérieur à ses frontières avec une Ukraine qui
reviendrait dans son giron et une Crimée dont l’annexion serait reconnue par la
communauté internationale. Et tant qu’il n’obtiendra pas cela, il continuera à
durcir l’épreuve de force en Syrie.
La notion de gambit s’applique aussi
aux Etats Unis qui, obnubilés par la volonté d’arriver à une normalisation avec
l’Iran, y regardent à deux fois quant à toute initiative contre Assad, l’allié
de Téhéran. Cela explique en partie les atermoiements de l’administration Obama
à chaque fois qu’une opération d’envergure est envisagée contre le régime du
président syrien. S’il y a une unanimité, même de façade, pour réduire
l’Organisation de l’Etat islamique (OEI), la donne change dès qu’il s’agit de
Damas. Cela ne signifie pas qu’Assad peut espérer durer encore des années.
Mais, pour quelqu’un dont on disait qu’il tomberait très vite, le fait d’avoir
gagné cinq années de survie est déjà un grand miracle. Et il sait que le peuple
qu’il est en train de détruire, ce peuple qui est finalement l’objet du grand
gambit car sacrifié pour la survie du régime, continuera de faire les frais de
calculs diplomatiques qui n’ont rien à voir avec la Syrie.
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3 commentaires:
Cher frère et ancien voisin de la cité DNC
Tu touches le fond avec ton analyse sur la Syrie,car il n'est pas possible pour un Akram Blekaid de faire semblant d'ignorer les tenants et les aboutissant ainsi que les acteurs, sous l'ombre ( Arabie Saoudite, Qatar, Turquie, États-Unis et Israël) dont tu oublies trop souvent de citer le nom, par peur de représailles sans doutes, surtout depuis que les médias t'invitent à commenter l'actualité ( TV5 monde) tu as dû faire un choix (satanique) celui de vendre ton âme au diable... Mais saches que tu finiras sans doute comme ce savant "Faust" héros d'un conte populaire allemand qui déçu par l'aporie à laquelle le condamne son art, contracte , lui aussi un pacte avec le Diable.
Tu n'as pas le droit de cacher la vérité, surtout quand tu écris, à des Algériens, dans un quotidien Algérien ( Le Quotidien d'Oran, que j'ai d'ailleurs arrêter de lire à cause de toi...)
Je comprends que la vie devient dure en France pour tout le monde et surtout pour un Algérien (arabo/tunisien) comme toi,mais tout de même il s'agit de l'histoire et nul n'a le droit de réécrire l'histoire à l'envers de la réalité.
Et même si mon commentaire sera censuré , il aura au moins été lu par Akram ...aura-t-il cette fois le courage de le publier? je doutes.
La Cité DNC te salue
Meskine...
Incapable d'imaginer que l'on puisse avoir un avis sans être "vendu"... Sans chercher un quelconque intérêt matériel ou médiatique...
J'assume ce que j'écris, c'est ce que je pense.
Et contrairement à toi, je ne m'imagine pas que quelqu'un ayant des idées opposées soit payé par le régime syrien...
Peut être, un jour, apprendras-tu que l'on peut critiquer un texte, dire que l'on n'est pas d'accord, sans avoir à se comporter comme un voyou, ou tout simplement quelqu'un de mal élevé, en insultant sont auteur...
Que le salut et la paix soient sur toi.
http://akram-belkaid.blogspot.fr/2014/07/la-chronique-du-bledard-gaza-amina-et.html
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