Le Quotidien d’Oran, mercredi 22 novembre 2017
Akram Belkaïd, Paris
C’est une option très intéressante que
souhaite prendre la Banque de Norvège. Gestionnaire du fonds souverain du pays
– lequel fonds est alimenté par les recettes pétrolières et gazières –
l’institution financière propose de se désengager du secteur des hydrocarbures.
Autrement dit, le plus gros fonds souverain du monde (près de 1 000 milliards
de dollars d’actifs) n’investirait plus dans les sociétés liées à l’or noir ou
au gaz. A ce jour, ce fonds qui place son argent dans des actions, des
obligations et de l’immobilier, consacre près de 6% de ses placements en
actions au secteur des hydrocarbures.
Volonté
de diversification
Officiellement, la Banque de Norvège justifie
sa proposition faite au gouvernement (c’est à ce dernier de décider in fine) par
l’existence d’une trop grande dépendance du pays aux énergies fossiles. Hors
services, ces dernières représentent plus de 14% du produit intérieur brut
(PIB). Le raisonnement des argentiers norvégiens est qu’il faut que le fonds
souverains se diversifie et qu’il ne soit pas lui-même affecté par cette
dépendance. Dans sa lettre de motivation, la Banque de Norvège précise ainsi
que sa démarche « s’appuie exclusivement
sur des arguments financiers et des analyses ayant trait à l’exposition totale
de l’Etat [norvégien] au pétrole et
ne reflète aucunement une opinion quelconque sur l’évolution du prix du
pétrole, la rentabilité future ou le caractère durable du secteur pétro-gazier
».
En clair, l’établissement ne dit pas qu’il ne faut
plus croire dans la rentabilité des hydrocarbures et il ne veut pas que sa
suggestion soit interprétée comme une anticipation d’une baisse durable des
cours de l’or noir (ce qui diminuerait les revenus de la Norvège et de son
fonds souverain). Pour autant, ce qui est clair, c’est que la Banque centrale
veut se prémunir de la volatilité des cours à laquelle on assiste depuis
quelques années. Une telle approche préventive est un signal d’alerte adressé
aux autres producteurs d’or noir qui pensent que l’on finira tôt ou tard par
revenir à des niveaux de prix plus élevés sur de longues périodes. Car il y a
désormais une idée qui fait consensus chez certains analystes de marché :
les prix du brut seront de plus en plus instables au cours des prochaines
années.
Une
rare transparence
La Banque de Norvège s’est déjà éloignée du secteur
du charbon. Elle veut privilégier les énergies renouvelables, les nouvelles
technologies mais aussi l’immobilier sans oublier les incontournables
obligations d’Etat, un placement jugé sûr malgré les turbulences régulières sur
les marchés de la dette. Pour qui possède un fonds souverain ou des actifs à
valoriser, la stratégie financière de la Banque de Norvège mérite d’être suivie
de près voire d’être considérée comme un exemple à suivre.
Un autre élément plaide d’ailleurs pour cette
exemplarité, c’est celui de la transparence. Le site internet de l’institution
norvégienne fournit en temps réel le niveau de valorisation du fonds
souverains. Ses grandes décisions de placement ou d’investissement sont connues
du public. C’est la grande différence entre ce fonds et ses homologues du
Golfe. Pour ces derniers, et au-delà des discours policés, on ne sait jamais
s’ils sont la propriété du pays (et de ses ressortissants) ou celui des
familles régnantes.
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