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jeudi 21 novembre 2013

La chronique économique : Chine, une feuille de route pour plus de marché

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Le Quotidien d'Oran, mercredi 20 novembre 2013
Akram Belkaïd, Paris
 
Un peu plus de marché mais toujours autant sinon plus de Parti. C’est la conclusion lapidaire que l’on peut tirer à propos des travaux du troisième plénum du 18ème Comité central chinois. Nombreux étaient les observateurs qui espéraient des annonces spectaculaires en matière de libéralisation politique du régime. Ils en ont été pour leurs frais. Il n’y aura ni démocratisation ni ouverture majeure. Certes, Pékin a décidé la fermeture des camps de réinsertion par le travail (ce qui n’est pas rien !) et l’abandon de la politique de l’enfant unique. Pour autant, aucune rupture majeure n’est prévue. Le Parti communiste chinois (PCC) reste le seul maître à bord et il n’est pas question qu’il abandonne son monopole sur la vie publique.

LE PROJET «383»

Comme d’habitude, les choses sont un peu moins tranchées en ce qui concerne l’économie. Le PCC s’est ainsi engagé à céder un « rôle décisif » au marché par le biais de plusieurs réformes dont la feuille de route est décrite dans un document intitulé projet « 383 ». Le premier trois correspond à l’articulation entre Etat, entreprises (qu’elles soient publiques ou privées) et marché. Viennent ensuite huit domaines de réformes : la gouvernance, la réglementation concurrentielle, la gestion foncière, la finance, les finances publiques, les actifs étatiques, l’innovation et la libéralisation des échanges internationaux. Enfin, le dernier chiffre concerne trois objectifs à atteindre : faire en sorte d’apaiser les pressions venant de l’extérieur pour un changement du modèle économique chinois, la mise en place d’une législation sociale susceptible de diminuer les tensions et les disparités à l’intérieur du pays et, enfin, une intensification de la réforme foncière.

Il est encore difficile de cerner quelles seront les mesures concrètes qui naîtront de la « vision » 383. Dans leurs commentaires, de nombreux sinologues s’attendent à ce que les agriculteurs chinois aient davantage de droits sur les terres qu’ils travaillent (mais qu’ils ne possèdent pas). De même, il est prévu une refonte fiscale destinée à mettre plus de pression sur les entreprises publiques et à obliger les collectivités locales à mettre en ordre leurs finances. On pourrait aussi assister à une libéralisation plus marquée des taux d’intérêts bancaires (réforme prudemment entamée l’été dernier).

A l’inverse, le PCC n’entend pas abandonner à la société civile une partie des prérogatives détenues actuellement par l’Etat. Par exemple, il n’est pas question, du moins pour le moment, d’assister à l’émergence de puissantes associations de consommateurs, une revendication de plus en plus fréquemment exprimée sur les réseaux sociaux chinois.

La zone expérimentale de Shanghai

Autre point majeur : il ne semble pas qu’une réforme d’envergure soit prévue pour les entreprises publiques. Là-aussi, de nombreux observateurs espéraient l’annonce d’une ouverture de leur capital à des opérateurs privés, nationaux ou étrangers. L’Etat restera donc présent dans l’économie via ces mastodontes dont les performances sont souvent très critiquées. En réalité, comme le précisent plusieurs experts chinois dont Wang Jiann-Yuh, Pékin va surtout opérer par expérimentations localisées (*). D’où la mise en place en septembre dernier d’une nouvelle zone de libre-échange à Shanghai. C’est là que la feuille de route 383 sera testée de manière concrète. Sur le seul plan économique, bien entendu…


(*) La Chine se cherche un nouveau modèle économique, Afrique Méditerranée Business, Novembre 2013.
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