Akram Belkaïd, Pari
Le Quotidien d'Oran, mercredi 7 septembre 2016
Il y a bientôt huit ans, c’était à la fin de l’été 2008, la
planète encaissait une grave crise financière qui allait mettre au tapis nombre
d’établissements bancaires et enrayer durablement la croissance mondiale.
Aujourd’hui, la situation reste incertaine. Rares sont les indicateurs
macro-économiques globaux qui sont revenus à leurs niveaux d’avant la tempête.
L’activité reste atone dans de nombreuses zones à commencer par l’Europe. De
nombreux pays émergents sont en panne tandis que le chômage et les inégalités
continuent de progresser un peu partout. Face à cette situation, les économistes
et les décideurs politiques ne savent plus quel chemin prendre. Longtemps
présentée comme « la » solution devant mener à la reprise, la
politique monétaire plus qu’accommodante a montré ses limites. Certes, en
baissant leurs taux et en injectant de l’argent en permanence dans les
économies, tout en rachetant aux Etats leurs créances, les Banques centrales
ont certainement empêché un vrai cataclysme. Mais, aujourd’hui, le remède ne
fait guère plus d’effet et le patient, autrement dit l’économie mondiale, reste
très faible.
L’Etat appelé à
l’aide
C’est dans cette situation inquiétante pour l’avenir que de
nombreuses voix se font entendre pour réclamer des politiques étatiques plus
ambitieuses. Qu’il s’agisse du Fonds monétaire international (FMI) ou de
l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), le
message est le même : il faut d’urgence une augmentation des dépenses
publiques. Autrement dit, c’est le retour en grâce de la doctrine keynésienne.
L’Etat se voit de nouveau confier le statut de dernier recours, celui de l’acteur
de la dernière chance qui investit pour relancer la machine économique et
engendrer un cercle vertueux où chaque dollar dépensé serait caractérisé par un
haut coefficient multiplicateur (c’est-à-dire qu’il provoquerait des
investissements en cascade tous profitables à la croissance du Produit
intérieur brut). Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si les deux principaux
candidats à la présidentielle américaine, Hillary Clinton et Donald Trump,
évoquent dans leurs programmes la nécessité de lancer de grands travaux
d’infrastructures pour relancer l’économie et augmenter les impôts.
Et les
entreprises ?
Ce n’est pas la première fois que le recours à la dépense
publique est présenté comme la solution idéale. Pour autant, cela intervient
dans un contexte où la règle résidait dans le respect du dogme de
l’assainissement des comptes et de l’application de politiques d’austérité. La
question qui se pose aujourd’hui est de savoir comment augmenter la dépense
publique quand les Etats ont perdu une bonne partie de leurs moyens
budgétaires. Doivent-ils s’endetter ? Et, si oui, auprès de qui ? Du
marché ? Des épargnants ? Doivent-ils augmenter les impôts ? Et,
si oui, de quelles catégories ? Les ménages ou les entreprises ? Les
réponses ne sont pas neutres et obligent à aller plus loin que la simple
exigence d’augmentation des dépenses publiques. Cela d’autant plus que l’argent
ne manque pas. De nombreuses entreprises, notamment les multinationales, ont
amassé des tonnes de cash dont elles se servent pour mieux rémunérer leurs
actionnaires, pour racheter leurs propres actions (ce qui fait augmenter
mécaniquement leurs valeurs boursières) ou pour racheter des concurrents. A
l’inverse, ces entreprises investissent peu au prétexte que la confiance n’est
pas au rendez-vous. Les grandes institutions internationales le savent mais
l’idée que les Etats puissent légiférer pour obliger (ou encourager) le secteur
privé à investir quand il a autant de moyens financiers ne fait pas (encore)
partie de leurs propositions.
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