Le Quotidien d’Oran,
jeudi 13 avril 2017
Akram Belkaïd, Paris
Parlons encore de
l’élection présidentielle française puisque c’est l’un « des » sujets
du moment. A moins de deux semaines du premier tour, le moins que l’on puisse
dire c’est que l’expression « c’est la bouteille à l’encre » semble
des plus pertinentes. Avec plus de 40% d’indécis parmi les électeurs, tout est
possible y compris une grande surprise. Reste bien sûr à savoir laquelle.
Jusqu’il y a peu, le scénario suivant était le plus souvent cité : Marine
Le Pen et Emmanuel Macron se qualifient pour le second tour. Ensuite, c’est le
leader d’En Marche qui l’emporte avec plus de 60% des suffrages (ce qui donne
tout de même près de 40% des voix à la fille de Jean-Marie…).
Cette combinaison
demeure très probable. Les sondages – dont il convient de se méfier, on ne le
répétera jamais assez, en raison de la grande marge d’incertitude – continuent
de la valider. Arrêtons-nous et réfléchissons quelques minutes à cette
perspective. Depuis 2013 et l’enlisement en rase de campagne de la politique de
François Hollande, la possibilité que Marine Le Pen soit au second tour est
devenue une évidence pour de nombreux commentateurs de la vie politique
française. Mais qui aurait pu prédire que son principal adversaire serait
Emmanuel Macron ? Qui connaissait son nom en 2012 ? Souvenons-nous
qu’en 2014, l’idée même que Manuel Valls soit candidat à la présidentielle
faisait encore partie de ces hypothèses plus ou moins farfelues que les
journalistes politiques aiment à évoquer quand il s’agit de remplir le vide. Et
parmi ces projections personne ne citait le nom de Macron. Autrement dit, la
première grande surprise de ce mois d’avril est déjà la présence de l’ancien
ministre de l’économie parmi les favoris du scrutin.
Bien sûr, on peut
parler à son sujet de « bulle ». On peut pointer du doigt le soutien
systématique dont il bénéficie de la part de nombreux médias, y compris
publics. On peut aussi estimer que les déboires judiciaires et moraux de Fillon-pognon
ont beaucoup aidé son ascension. Il n’empêche, voilà quelqu’un surgit de nulle
part, qui a eu l’intelligence tactique de ne pas participer aux primaires du
Parti socialiste (où il n’avait aucune chance de l’emporter) et qui se prépare
à rafler la mise. Drôle d’époque… Le plus sidérant dans l’affaire, c’est que
l’on pourrait penser que la crise de 2008 et les difficultés économiques
actuelles déconsidèrent la candidature de celui qui n’est rien d’autre qu’un
néo-libéral déguisé sous de légers oripeaux de gauche ou de social-démocratie.
Il n’en est rien. La capacité de certaines catégories d’électeurs – on pense
ici aux classes moyennes urbaines – à toujours voter contre leurs propres
intérêts demeure un mystère. Mais passons.
L’affaire est-elle
vraiment entendue ? Poser cette question revient à examiner les chances de
trois autres candidats. C’est-à-dire Marine Le Pen, pour ce qui est du résultat
final, et François Fillon ainsi que Jean-Luc Mélenchon pour la qualification au
premier tour. Pour ce qui est de la première, on notera que les prévisions de
Cassandre annonçant sa victoire au deuxième tour se font de plus en plus rares.
A peine concède-t-on l’idée qu’elle pourrait l’emporter en cas de grave
incident au cours des prochaines semaines, on pense notamment à des attaques
terroristes qui pousseraient de nombreux électeurs dans les bras de la
frontiste. A-t-on raison de penser que Le Pen ne peut pas l’emporter
autrement ? Encore une fois, l’importance du nombre d’indécis doit
exhorter à la prudence.
Si Marine Le Pen est
présente au second tour face à Emmanuel Macron, il est fort possible que de
nombreux électeurs de gauche s’abstiennent. Il est aussi possible que de
nombreux électeurs de droite dite républicaine (vous savez, les supporters de Fillon)
en fassent autant ou même qu’ils accordent leur bulletin à l’extrême-droite. A
partir de cette hypothèse, tout est possible sur le plan arithmétique y compris
une victoire, certes serrée, de Marine Le Pen contre l’ancien ministre et
protégé de François Hollande. Ce sera alors la grosse surprise du mois de mai…
Parlons maintenant de
François Fillon. L’homme a réussi l’exploit de garder auprès de lui le cœur de
l’électorat de droite. Toutes les révélations sur ses comportements de
Thénardier n’ont pas suffi à provoquer son effondrement dans les intentions de
vote. Est-ce pour autant suffisant pour qu’il puisse espérer être présent au
second tour ? La réponse la plus fréquente est négative. Voilà une autre
surprise quand on sait qu’au lendemain de la primaire de droite – où sa
victoire n’était pas absolument pas prévue – on évoquait déjà ses grandes
chances d’être élu en mai 2017. Ne nous trompons pas, une défaite de Fillon dès
le dimanche 23 avril serait une grande surprise. Bien plus grande que celle,
annoncée, du socialiste Benoit Hamon, dont il n’a pas été question jusqu’ici
tant l’affaire semble entendue concernant sa formation. Pas de PS ni de Les
Républicains (ex-RPR, ex-UMP) au deuxième tour. Voilà deux autres faits qui
auraient parus impossibles il y a quelques années à peine.
Terminons maintenant
par le grand zaïm, le nommé Jean-Luc Mélenchon pour lequel, il faut être franc,
le présent chroniqueur n’a guère de sympathie ni de respect en raison de ses
positions pour le moins ambiguës sur la Syrie. C’est peut-être la plus grande
surprise de cette compétition électorale. Au fil des semaines, le leader de la
France Insoumise a effectué une spectaculaire remontée dans les sondages, les
intentions de vote et même la popularité (68% d’opinions favorables soit +22
points en un mois !). Une dynamique que personne n’a prévue et qui, si
elle se confirme en fera le troisième homme de cette élection. Est-ce suffisant
pour qu’il aille « chercher » Marine Le Pen ou Emmanuel Macron et
être présent au deuxième tour ? Les sondeurs en doutent mais ce sont les
mêmes qui n’ont pas vu venir sa percée.
Dans l’hypothèse d’une
présence au second tour, Jean-Luc Mélenchon l’emporterait contre n’importe quel
adversaire, qu’il s’agisse de Le Pen, de Macron et, plus encore, de Fillon.
Cette perspective donne des ailes à ses supporters qui sont, de loin, les plus
présents sur les marchés et les lieux publics. Son élection constituerait alors
la plus grande des surprises d’avril et de mai. Et elle ouvrirait un chapitre,
on ne peut plus… intéressant, de l’histoire de France.
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1 commentaire:
Redondant cette détestation de tout et tellement algérienne.
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