-->
Le Quotidien d’Oran,
jeudi 31 décembre 2015
Akram Belkaïd, Paris
Allez, viens, mais viens
j’te dis ! Non, juré, je ne vais pas te raconter la fin du film. Comment ?
On dit « spoiler » maintenant ? Attends, je cherche. Ah oui :
« un spoiler, terme emprunté à l’anglais
signifiant gâcher, désigne toute chose qui interrompt le suspense ou dévoile
une partie d’une énigme, ce qui a pour effet de supprimer tout mystère quant au
dénouement » (source linternaute.com). C’est promis, je ne vais pas te
« spoyler » le film mais juste te raconter deux ou trois trucs, un
peu comme pour l’histoire du dauphin (*). Ah, tu vois que ça t’avais bien plu !
Donc, c’est le septième épisode.
Au moins, celui-là personne ne va se tromper ou te demander des précisions.
Parce qu’avec les précédents, c’est devenu compliqué. Pour moi, le numéro un de
la série, c’est toujours et encore « Un nouvel espoir » parce que c’est
le premier de tous, celui qui est sorti en 1977. Mais les « djeunes »
et les ados d’aujourd’hui, t’expliquent gentiment que c’est le numéro quatre
parce que la chronologie de sortie des films ne les intéresse pas. Ce qui
compte pour eux, c’est le déroulement de l’histoire avec, au commencement, « La
menace fantôme » de 1999. Tiens, petit raisonnement mathématique.
Imaginons qu’il y ait une quatrième trilogie et qu’elle raconte des évènements
qui se sont déroulés avant ceux de la troisième (trilogie), autrement dit celle
qui vient de commencer. Cela veut donc dire que le septième épisode qui est sur
les écrans doit d’ores et déjà être considéré comme le numéro dix ! Tu me
suis ? Non. Pas grave, on revient à l’histoire.
Comment ? Ça s’appelle
des « prequels » ? Attends, je cherche encore. Ah, voilà : Au
cinéma, « un prequel est un film
reprenant l’univers et une partie des personnages d’un autre film existant,
mais racontant une autre histoire, s’étant déroulée avant le film ayant servi
de modèle. Exemple : ‘’Le monde de Dorri’’ est un prequel au ‘’Monde de Némo’’ »
(même source). D’accord ! Tiens, il faudra que je te parle de Némo. Non,
ne fais pas la tête, on revient à l’histoire.
D’abord, il y a toujours
des gens qui se battent à coups de néons multicolores et ça fait toujours le même
bruit de vibrations. Bizarre comme ça peut fasciner ce genre de truc. Il
fallait y penser. Des épées, mais en forme de tube lumineux. Ah, petite nouveauté,
l’un des sabres, je crois que c’est celui du méchant, a une garde qui peut
faire penser à une croix. Il paraît que les afficionados
ont protesté contre cette bid’â
(innovation blâmable chez les musulmans). Pardon ? Bien sûr qu’il y a un méchant.
Très méchant même. Bon, je ne te dirai rien de plus si ce n’est qu’il a bien
une sale gueule avec ou sans masque. Attends, ne proteste pas, tout le monde
sait que le vilain du septième épisode a un masque. C’est en vente partout, c’est
sur toutes les couvertures de magazines. J’en ai même porté un. Si, si. J’ai
pris un selfie et l’ai posté sur instagram. J’ai reçu beaucoup de commentaires étonnés
ou carrément catastrophés. J’en suis bien content. Je me dis que ces amies et
amis ont cessé de penser pendant quelques secondes à Valls et à Hollande, tu
sais les deux nouveaux supplétifs du Front national…
Bon, revenons au film.
Donc, le méchant très méchant est là dès le début. Il y a aussi une actrice qui
joue dans Game of Thrones et qui fait
partie des vilains masqués. Et tout ce beau monde cherche à tuer le plus grand
nombre de gentils et à faire sauter plein de planètes qui n’ont rien demandé.
Bien sûr, il y a un héros. Deux même. Chacun fait partie d’une minorité. Un
noir et une femme. Tu vois, il y a toujours un moment où Hollywood va plus vite
que le reste du cinéma mondial. Combien de films français où le héros est une
femme ou un noir ou un arabe ? Peu. Si peu… Tiens, l’acteur noir est même
un petit peu enveloppé ce qui pourrait inclure une troisième minorité. La
femme, elle, pourrait poser pour ce journal féminin qui vient de fêter ses
soixante-dix ans et qui se prétend encore féministe…
Il y a donc, un méchant,
très méchant mais qui a quelques lignes de faille. C’est ça la clé pour réussir
un film d’action. Il faut prendre plus de soin à composer le personnage du
vilain qu’à celui du héros. Prends Tintin. Que serait ce falot sans humour ni
fantaisie si Rastapapoulos n’existait pas ? Bien sûr, le second rôle
compte tout autant. Là aussi, qu’est-ce que Tintin sans le capitaine Haddock ou
même le professeur Tournesol ? Mais là, pour ce numéro sept, futur numéro
dix, ce qui change tout, c’est que le héros est une héroïne. Donc, c’est
tellement nouveau, y compris dans cette saga où, jusque-là les femmes étaient
un peu nunuches, qu’on a aucun mal à accompagner l’intrigue. Et donc je ne me
suis pas surpris à espérer que le méchant très méchant dégomme tout le monde
pour qu’on en finisse une bonne fois pour toute. Ah, le vilain au costume noir
de la première trilogie… Cette musique à la fois inquiétante et sublime qui l’accompagnait…
On n’a rien inventé de mieux que Darth Vader – que des zozos monolingues ont, hélas,
traduit en Dark Vador.
Donc, je résume. Il y a
de la castagne, des vaisseaux qui hurlent comme des éléphants, des batailles et
des bombardements spatiaux, une machine infernale, des images sublimes du désert
(d’Abou Dhabi, pas celui de la Tunisie), des terres enneigées, des goules, des
robots qui bipbipent ou qui minaudent, des revenants (que le public des fans
applaudit avec joie), un type sur une falaise qui regarde la mer en tournant le
dos à la caméra, une naine dans un costume d’E.T., du charabia technique
belbezef, et des acteurs et actrices prometteurs appelés à revenir en 2017 pour
l’épisode huit (futur onze) et en 2019 pour l’épisode neuf (futur douze). Bon,
de toi à moi, je n’ai pas tout compris et pas toujours saisi qui est qui et qui
a fait quoi. Mais ça vaut tout de même le coup d’être vu d’autant que tu peux y
aller en famille vu qu’il n’y a pas de scènes de khichibichi. Bon, allez, que la force soit avec toi. La prochaine
fois, je te raconte Le monde de Némo…
(*) Monologue de celui
qui a regardé une histoire de dauphins, Le Quotidien d’Oran,
jeudi 20 août 2015
P.S : Le blédard
souhaite une bonne année 2016 à
celles et ceux qui ont eu le courage (ou pas) d’aller jusqu’au bout de cette
chronique (et des autres aussi…).
_
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire