Le Quotidien d'Oran, mercredi 9 avril 2014
Akram Belkaïd, Paris
Plus de 7% ou moins de 7% ? C’est la question
récurrente à propos de ce que sera, en 2014, la performance de la croissance du
Produit intérieur brut (PIB) de la Chine. Déjà, en 2013, on pensait que le taux
de progression en matière de création de richesses passerait sous cette barre
symbolique après avoir déjà décroché du pallier des 8%. Au final, la croissance
économique a été de 7,7% en 2013 mais les experts pensent qu’il sera
difficile pour Pékin de maintenir ce niveau. A moins de recourir encore aux
inévitables solutions keynésiennes…
Stimuler la croissance n’est pas la créer
Le gouvernement chinois vient en effet de décider de lancer
de nouvelles mesures de stimulation de l’économie pour contrebalancer le
ralentissement de l’activité. Et comme ce fut le cas en 2013, les grands
chantiers seront de nouveau à l’honneur avec 6 600 kilomètres de voies ferrées
qui vont être mises en place (1 000 kilomètres de plus qu’en 2013) et plus de
4,7 millions de logements sociaux qui seront construits. Au total, les travaux
d’infrastructures vont représenter 30% du Produit intérieur brut. De quoi
largement permettre à la Chine de maintenir une croissance au moins égale à
celle de l’année dernière. Et pour bien se représenter l’ampleur des projets en
cours, il faut savoir que 60% du parc mondial des grues est concentré en Chine…
Cette omniprésence des infrastructures dans les politiques
économiques chinoises appelle deux remarques. D’abord, comme l’ont constaté
nombre d’économistes, on voit bien que la Chine a encore du mal à compenser le
ralentissement de ses exportations (provoqué par une baisse de la demande
mondiale) en favorisant le développement d’une économie tertiaire interne. En
clair, le rythme au ralenti de « l’usine du monde » n’est pas
compensé par les services et le marché intérieur. D’où la nécessité de s’en
remettre aux grands travaux.
Ensuite, une autre réflexion, moins fréquente, est que cette
démarche chinoise risque d’induire en erreur nombre de pays en développements
notamment africains. D’Alger à Kinshasa, il n’est question en ce moment que des
infrastructures. Bien entendu, il y a nécessité pour les pays concernés de
combler des décennies de sous-investissements et d’offrir les meilleures
infrastructures possibles pour soutenir et stimuler l’activité économique. Routes,
autoroutes, voies ferrées, aéroports, centrales électriques, ports : tout
cela est fondamental.
Eléphants blancs et corruption
Le problème, c’est qu’il ne sert à rien de construire des
infrastructures sans s’être appuyé sur une stratégie économique globale. S’engager
dans des projets coûteux nécessite d’être en adéquation avec une politique
économique cohérente et ayant des objectifs précis. Pour dire les choses de
manière plus simple : les projets d’infrastructures ne font pas le
développement à eux seuls. Ils ne sont qu’un moyen, un outil et un prérequis
mais certainement pas une finalité. C’est d’ailleurs parce qu’ils ignorent cela
que nombre de pays se retrouvent avec des « éléphants blancs »,
c’est-à-dire des réalisations que l’on inaugure en grande pompe et qui, par la
suite, ne servent plus à rien. D’ailleurs, l’un des autres grands problèmes de
la priorité accordée aux infrastructures réside dans la corruption que cela
engendre. C’est cette réalité que la Banque africaine de développement (BAD)
aborde de manière implicite quand elle estime que nombre de ses membres se
focalisent trop sur les grands projets et cela au détriment de ce qui compte le
plus, c’est à dire l’éducation et la formation.
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