Mark Behr est un écrivain sud-africain (il écrit en anglais et en afrikaner). Il a été soldat et a
combattu en Angola.
- « Si Nelson Mandela était considéré comme un
terroriste par l’Afrique du Sud blanche, d’autres en faisaient autant. Trois
ans avant sa libération, après vingt-sept années d’enfermement, Margaret
Thatcher, première ministre britannique, parlait encore de l’ANC, dont il était
le leader comme d’un ‘’exemple typique d’organisation
terroriste’’. (…)
- Maintenant que le nom de Mandela est universellement
célébré, il est gênant de se rappeler que, il y a peu, c’était nous, les gens
prétendument civilisés, qui utilisions ce langage pour justifier notre
politique et nos guerres ; nous, dont les privilèges, le silence et les
actes ont maintenu des gens comme Nelson Mandela en prison, et la majorité des
Noirs d’Afrique en situation d’infériorité et de servitude légale. Nous étions
des racistes. C’était même sans doute nous, les Blancs – moi compris – les vrais
terroristes. (…)
- Sa [Nelson Mandela] volonté d’humaniser l’adversaire et tous ceux qui s’opposaient encore
à l’égalité raciale et à la démocratie a changé la nature du discours politique
à tout jamais. (…)
-
Par ses paroles et ses actes, Nelson Mandela suggère que l’imagination et la
responsabilité morale sont au cœur de toute démarche vertueuse. Chez Nelson
Mandela, comme chaque jour dans ce pays, nous avons assisté à une libération du
potentiel humain sous des formes qui obligent à se demander, parfois avec
remords, honte et un sentiment nouveau de responsabilité, ce qu’aurait pu être
l’Afrique du Sud – et le monde aussi, d’ailleurs – si l’on n’avait pas laissé
le fléau du racisme souiller l’histoire de l’humanité pendant cinq siècles.
-
La démocratie ne peut s’épanouir qu’au sein de civilisations ne fuyant pas le
dialogue : un dialogue ancré dans le présent, mais qui cherche néanmoins à
saisir les rapports entre passé et présent. (…)
-
Nelson Mandela nous lègue la certitude que, sans cette forme d’empathie absolue
– cet effort d’imagination pour se mettre à la place des autres, les marginaux,
les pauvres, ceux qui n’ont toujours pas voix au chapitre, qui possèdent le
moins -, il ne pourra y avoir aucun changement personnel, social ou politique,
et, à coup sûr, aucune justice.
In
Le Monde, 8 décembre 2013 (traduction de l’anglais par France Camus-Pichon)
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