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Dernier ouvrage paru : L'Algérie en 100 questions. Un pays empêché (Tallandier, 2019)

mercredi 2 mars 2022

Le pas de côté : Non au campisme

Par Akram Belkaïd

Paris, mercredi 2 mars 2022

 

L’invasion de l’Ukraine par les forces armées russes déclenche un peu partout passions et divisions. Dans ce genre de situation, les adeptes du campisme – autrement dit ceux qui multiplient les injonctions à choisir son camp – entretiennent la confusion et poussent à la surenchère et à la radicalisation des positions. Les uns condamnent Poutine et vont jusqu’à exiger un conflit armé avec la Russie. Les autres rappellent, à juste-titre, que d’autres pays ont envahi ou annexé des territoires qui ne leur appartiennent pas et que cela ne déclenche pas les mêmes réactions indignées.

 

Que faire ? 

 

Comme pour toute crise majeure, l’unique boussole devrait être le respect du droit international et de la Charte des Nations Unies. Qu’importe la nature des régimes concernés et qu’importe le passif des uns ou des autres. Je m’explique. En 1990, l’invasion du Koweït par l’Irak de Saddam Hussein a provoqué une situation comparable à celle que nous vivons aujourd’hui. Il s’agissait alors d’une agression contraire au droit international puisque Bagdad entendait annexer un pays souverain reconnu par la communauté internationale. Arguant de la nature détestable de la monarchie koweitienne, nombreux furent ceux qui y trouvèrent argument pour ne pas condamner l’attaque irakienne. Or, cette condamnation était nécessaire et légitime. En attendant que l’humanité trouve mieux, la règle est simple : on n’attaque pas son voisin, on ne l’envahit pas et, surtout, on ne l’annexe pas. Le respect des frontières est la clef de voûte de la paix dans le monde.

 

Cela vaut pour ce qui se passe en Ukraine. La condamnation de l’attaque russe doit être sans équivoque et même, s’il le faut, sans passion aucune. Le droit international est trop précieux pour être séquencé ou relativisé. Et c’est cette condamnation qui donne du crédit à la position non-campiste que l’on est en droit de défendre. Condamnation ne veut pas dire naïveté ou complicité avec l’Occident. Oui, la Russie a des griefs légitimes à l’encontre de l’Occident et plus particulièrement des États-Unis. Oui, la promesse faite à Mikhaïl Gorbatchev de ne pas étendre à l’est les forces de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN) n’a pas été respectée. Oui, la mise en garde vindicative de Vladimir Poutine contre l’unilatéralisme américain lancée en février 2007 lors de la Conférence sur la politique de sécurité n’a pas été prise au sérieux ou, pire, elle a été méprisée. Tous ces arguments sont recevables pour réclamer des négociations pour la paix mais ils n’excusent pas l’attaque de l’Ukraine et la mort de civils.

 

Personne ne niera que le droit international n’est pas toujours respecté par les pays qui le brandissent aujourd’hui afin de sanctionner la Russie. En 1991, il fut mis en avant pour « libérer » le Koweït alors que, dans le même temps, il continuait d’être violé par Israël qui, aujourd’hui encore, continue d’occuper – et de coloniser - des Territoires palestiniens qui ne lui appartiennent pas sans oublier l’annexion illégale du plateau du Golan syrien. Dans les deux cas, Israël foule aux pieds plusieurs résolutions des Nations Unies et cela décrédibilise les discours occidentaux à l’encontre de la Russie. Nous en avons l’habitude : droit international en faveur des uns mais pas des autres… C’est bien pour cela que la condamnation de l’invasion russe est nécessaire. Elle relève d’une cohérence de position. Si nous revendiquons le droit des Palestiniens à être libres et à bénéficier des résolutions de l’ONU, nous ne pouvons pas décider de regarder ailleurs en ce qui concerne l’Ukraine. Le message à l’égard de l’Amérique et de l’Union européenne est simple : Nous condamnons comme vous cette invasion mais nous ne sommes pas dupes quant à vos principes à géométrie variable. Et en cela, nous ne sommes pas dans le même camp.

 

Cela amène, pour finir, à la remarque suivante. Oui, il est toujours désagréable d’avoir la sensation d’être dans le même bateau que les BHL et autres néo-conservateurs qui s’étaient déjà illustrés en 2003 en soutenant l’agression anglo-américaine contre l’Irak. Ces gens sont des clowns dangereux dont la posture belliciste a déjà fait beaucoup de dégâts. Rappelons donc la formule d’usage qui sied à ce genre de situation : une montre cassée donne tout de même l’heure exacte deux fois par jour. Condamner l’invasion de l’Ukraine par la Russie, ce n’est pas être dans le même camp que BHL et compagnie. C’est juste une coïncidence, surtout si on rappelle à cette camarilla ses silences et compromissions à propos de la Palestine. 

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7 commentaires:

Anonyme a dit…

Position raisonnable sans oublier comme l'a écrit un économiste américaine que ce qui se profile c'est la "dédollarisation" des échanges économiques ce qui ne va pas manquer d'intensifier le conflit ...

Pascal UK a dit…

A propos des engagements de non expansion de NATO que vous reprenez dans votre article, voici ce qu'en dit la BBC :

"In President Putin's eyes, the West promised back in 1990 that Nato would expand "not an inch to the east", but did so anyway.

"That was before the collapse of the Soviet Union, however, so the promise made to then Soviet President Mikhail Gorbachev only referred to East Germany in the context of a reunified Germany. Mr Gorbachev said later 'the topic of Nato expansion was never discussed' at the time."

Qui faut-il croire ?

https://www.bbc.co.uk/news/world-europe-56720589

zonefranche1 a dit…

Bonjour,
D'accord, d'accord.Mais ne sommes nous pas en quelque sorte "coincé" De quelle autre façon Poutine aurait-il pu répondre aux diverse formes d'agressions de la part du camp occidental (que d'ailleurs vous vous notés)

Anonyme a dit…

Le « pas d’à côté » non-campiste l’est-il vraiment quand il consiste d'une part à condamner l’agresseur, au nom du respect du droit onusien, et d'autre part de reconnaitre fort justement les mêmes torts et forfaitures (réitérés) chez l’agressé ? C’est en tout cas la caractéristique de la plupart de leurs publications et déclarations paradoxales du moment (lire pour exemple très significatif la dernière interview de Noam Chomsky publiée le 04 mars 2022 dans Comprendre, International par Ballast).
Dès lors la condamnation de l’agresseur, une fois le fait de déclaration de guerre accompli, ne vaut plus rien. Sauf à vouloir sauver sa bonne conscience ou sa campagne électorale. L’incohérence des non-campistes non-alignés prenant voix au chapitre actuellement est de s’être réveillés bien trop tard, une fois mis devant le fait accompli. Quand bien même ils auraient retrouvé, en fouillant dans leurs archives, quelque anciennes mises en garde éparses. Il sera ensuite toujours temps (si l’issue du conflit le permettra) d’expliquer qu’on vous l’avait bien dit. Pour ce qui est dit des campistes dans cet article, on ne saurait mieux dire.

Unknown a dit…

Bonjour,
J'ai trouvé votre article très intéressant mais je pense qu'on peut le compléter par d'autres remarques.
Je vois la question des minorités et de leur droit à choisir leur destin. En l'espèce, celui des minorités russophones qui se jugeaient persécutées dans une Ukraine qui rétrograde le statut de la langue russe. Il y a eu ( je crois) un référendum dans la partie russophone du Dombass ( comme du reste en Crimée) qui a abouti à la proclamation des républiques de Donesk et Lougansk.
Le droit international reconnait aussi le droit de certaines "parties" d'un Etat à devenir indépendantes et constituer un nouvel Etat comme l'Erythrée, issue de l'Ethiopie. Les frontières ne sont donc pas intangibles et bien des minorités aspirent à l'indépendance qu'elles ont ou non connue dans le passé, par exemple les provinces chinoises du Tibet ou du Sinkiang.
En tout cas merci de votre blog, continuez !
Pierre Vallin

Anonyme a dit…

Encore une guerre qui n'a aucun sens. A cause d'un traité qui n'a pas été signé. L'Ukraine est un pays qui semble si naîf qu'il a mis ses missiles nucléaire à disposition des Etats Unis et autres pays qui ont avaient signés un accord de défense. Hors c'est fou, avoir l'arme nucléaire était le seul moyen de se mettre à la table des membres permanents de l'ONU en étant la 2 ème puissance nucléaire du monde après la Russie.
Lorsqu'on s'aperçois que ce président issue d'une religion judaïque votre pour installer son ambassade à Jérusalem en soutien au gouvernement israélien pour l'annexion de la Palestine. Il est normal que les pays arabes n'iront pas défendre une Ukraine qui leur à cracher sur un peuple persécuté et dépouillé de leur terre. Mieux encore, On le voit avec la Syrie, la Georgie, l'Irak, le peuple sunnite à été massacré par le régime du bâtard el assad. Qu'a fait l'Europe concernant l'exile de ce peuple ? Saddam faisait régner une certaine paix dans un pays où ils avaient plusieurs Etnie religieuse (une partie Kurde, une seconde partie qui avait le pouvoir les sunnite et la troisième par les chîtes majorité en iran et en Irak. La fin de la guerre à rendu donner un regain de révolution au kurde qui ont été massacré par les chîte vu que les sunnites ont perdu la guerre face à la coalition des nations unis (tout cela pour du Pétrole).
Les éxilés du moyens orients n'ont plus de droit, n'ont plus de patrie, ils n'ont plus rien, ils ont même perdu leur dignité à vivre et être traités comme des chiens par les européens.
Alors, tout le monde est contre la Russie, Sauf que moi, je ne suis pas vraiment contre la Russie. Il faut arrêter de prendre Poutine pour un faiblard. Il a prouvé que L'OTAN, ONU, Union Européenne sont une vaste fumisterie.
Mes prédictions sont une prise de l'ensemble des anciens pays de l'ancienne Union Soviétique.

La vérité c'est que tout est la faute d'un juif qui a été mis au pouvoir, le Président Zelenski à allumer la mèche en demandant d'entrer dans l'Otan sachant que certains pays ne l'accepterai jamais.
L'Ukraine n'a pas laissé le choix à la région du Donbass concernant les accords de Minks ( pas de référendum sur l'autonomie du Dombass, avec des russes traités comme de la merde et oubliés par ce gouvernement). Il est normal que la Russie se défende face à ce genre de situation.
A plusieurs reprise l'Ukraine à chercher la merde et aujourd'hui, elle veut que le monde entre en guerre contre la Russie. Je n'ai pas de preuve, mais à force de crier au loup que les russes tuent des enfants, bombardent des hôpitaux, je pense que c'est de la pure médiatisation pour faire passer les russes pour des criminels de guerre.
Je ne donne pas 100% au Russes, mais je ne donne pas raison non plus à cette Ukraine qui à protéger qui a commis des crimes contre l'humanité (les Palestiniens en Péril).

Alors que l'OTAN, l'UE, L'ONU se démerde avec leur merde. Et surtout que l'Ukraine se démerde avec son peuple pour se battre contre la Russie. Et j'espère que ceux qui ne sont pas de nationalité Ukrainienne partie en guerre contre la Russie seront condamné en tant que terroriste et assassin dans leur propre pays (car certains partie en Syrie lutter contre le régime du bâtard d el assad ont été condamnés par les pays béligérant faisant partie de l'UE.

Anonyme a dit…

Contente d'avoir pu lire ce texte dans la Libre (Belgique).