Le Quotidien d’Oran, mercredi 18 octobre 2017
Akram Belkaïd, Paris
La semaine dernière l’Arabie saoudite a annoncé une baisse
de sa production de 560 000 barils par jour à partir du mois de novembre. Pour
les observateurs, cela signifie que Riyad entend favoriser le prolongement de
l’accord de limitation des pompages (1,8 million de barils par jour) conclu au
sein de l’Organisateur des pays exportateurs de pétrole (Opep) en novembre
2016. La phase entamée en 2014 où l’Arabie saoudite entendait d’abord défendre
ses parts de marché (au détriment des cours) est donc révolue. Avec une telle
réduction, le royaume veut favoriser le retour du prix du baril dans une
fourchette comprise entre 60 et 70 dollars en moyenne.
Convergence avec la
Russie
Les déficits enregistrés par ce pays au cours de ces
dernières années ne sont pas la seule explication de ce changement de
stratégie. Riyad a un besoin urgent de fonds pour financer la diversification
de son économie mais aussi pour continuer à la fois d’acheter la paix sociale
et de poursuivre la guerre au Yémen. Il est évident qu’un baril à 60 dollars
vaut mieux qu’un cours à 30 ou 40 dollars, niveaux où l’or noir serait
certainement sans deux faits majeurs. D’abord, la réduction décidée en 2016 par
l’Opep mais aussi la bonne entente entre l’Arabie saoudite et la Russie. Il est
d’ailleurs intéressant de relever que les deux pays n’ont pas la même politique
au Proche-Orient, Moscou soutenant le régime syrien de Bachar al-Assad tandis
que Riyad continue de vouloir sa chute. Cela vaut aussi pour l’Iran, la Russie
étant un proche partenaire de ce pays tandis que la « guerre froide »
entre le royaume wahhabite et la République islamique est à l’origine de nombre
de conflits dans la région. Ces divergences n’empêchent donc pas une
coopération en ce qui concerne le pétrole.
L’Arabie saoudite souhaite aussi favoriser la hausse des
cours parce que c’est une condition importante pour réussir l’entrée en Bourse
de 5% du capital de l’Aramco, son entreprise publique pétrolière. Cette
dernière est prévue pour le second semestre 2018 et les grandes places que sont
le London Stock Exchange (LES) et le New York Stock Exchange (NYSE), autrement
dit la City et Wall Street, rivalisent pour attirer ce qui devrait constituer, dans
l’histoire, la plus importante des « IPO » (initial public offering, terme
consacré pour désigner une entrée en Bourse). En effet, la valorisation de
l’Aramco (laquelle déterminera ce que débourseront les investisseurs) se fera à
la fois sur la base de ses réserves prouvées de pétrole mais aussi de son
chiffre d’affaires avant taxation sans oublier, bien sûr, ses bénéfices. Plus
le baril sera élevé et plus la valorisation sera haute et ce, pour le plus
grand bien des finances saoudiennes.
Vers un placement
direct ?
Pour autant, il existe de sérieux doutes sur la possibilité que
cette IPO se fasse dans les temps. Les règles de Wall Street et de la City sont
très rigoureuses en ce qui concerne les nouveaux entrants. Pour être cotés dans
les plus prestigieux segments de ces marchés, il faut un minimum d’ouverture du
capital (au moins 20%), des bilans comptables et financiers remontant à
plusieurs années et certifiés cela sans oublier un descriptif clair de la
gouvernance de l’entreprise. Or, l’Aramco est une entreprise d’Etat, opaque
dans son organisation, et ses chiffres ne sont pas rendus publics dans leur
totalité. A cela s’ajoute le fait que Riyad ne veut mettre que 5% de son
capital sur le marché. Voilà pourquoi une IPO reste encore incertaine d’où la
piste d’un placement direct auprès d’investisseurs de références : les
entreprises pétrolières et chinoises seraient déjà sur les rangs en attendant
d’autres prétendants. Le feuilleton Aramco ne fait donc que commencer…
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