Lignes quotidiennes

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Dernier ouvrage paru : L'Algérie en 100 questions. Un pays empêché (Tallandier, 2019)

mardi 13 février 2018

La chronique économique : Tempête sur le bitcoin

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Le Quotidien d’Oran, mercredi 7 février 2018
Akram Belkaïd, Paris

Près de 20 000 dollars en décembre, moins de 7 400 dollars en début de semaine… Le moins que l’on puisse dire c’est que la chute du bitcoin s’accélère. Pour nombre d’observateurs, on est dans la phase classique de l’éclatement d’une bulle spéculative. Après les sommets, l’abîme. Reste à savoir jusqu’où la crypto-monnaie vedette va tomber. Et, surtout, quelles seront les conséquences financières et économiques de cet effondrement.

Offensive groupée

Il faut dire que les mauvaises nouvelles se sont multipliées concernant cette monnaie. Plusieurs grandes banques américaines (Citigroup, Bank of America,…) ont interdit à leurs clients d’acheter des bitcoins avec leurs cartes de crédit. Ils peuvent néanmoins continuer à le faire en utilisant des cartes de débits. Autrement dit, ces établissements financiers refusent qu’un découvert, synonyme d’endettement, ne serve à acheter une monnaie dont la valeur ne cesse de se déprécier. Autre coup dur, la décision du réseau social Facebook d’interdire les publicités et autres « pratiques promotionnelles fallacieuses et trompeuses » en faveur du bitcoin et d’autres cryptomonnaies. La « bitcoinomania » a du plomb dans l’aile…

Il y a aussi la volonté affichée de la Chine de venir à tout prix à bout de ce moyen de paiement qui échappe à toute régulation. Pékin veut en finir avec le bitcoin d’où sa décision d’interdire l’usage ou l’accès aux plateformes d’échange. Les autorités chinoises sont les plus en pointes dans la mise en place de mesures dissuasives ou punitives pour tout utilisateur du bitcoin. Cela est dû au fait qu’elles ne goûtent guère cette monnaie que sa banque centrale ne peut contrôler et qui sert aussi à faire fuir des capitaux de Chine. Autre raison, moins évoquée par les médias, le système bitcoin est un grand consommateur d’énergie car il utilise des chaînes d’ordinateurs de particuliers mobilisés pour leurs capacités de calcul. Pékin ne veut donc plus que ses centrales de production d’électricité soient mobilisés par ces machines.

Enfin, plusieurs pays occidentaux, dont la Grande-Bretagne et la France, estiment qu’il est temps de légiférer pour encadrer les cryptomonnaies. La question sera même abordée lors du prochain G20 en mars. Tout cela ressemble donc fort à une offensive en règle contre le bitcoin et rappelle que les Etats, et les banques, n’aiment guère qu’on empiète sur leurs prérogatives. Depuis des siècles existe l’idée de monnaies gérées par les propres utilisateurs. Des monnaies ou alors des moyens de paiements alternatifs. A chaque fois, les Etats ont fini par reprendre la main, parfois de manière radicale.

Retour au stade initial


Le bitcoin est-il pour autant condamné ? Plusieurs de ses partisans espèrent que cette purge sera salvatrice. Avec ce repli brutal, la monnaie devrait être moins exposée à la spéculation et pourra peut-être retrouver son statut initial de moyen de paiement alternatif. On peut aussi penser que la technicité qui entoure le bitcoin empêchera la Chine et d’autres pays de l’interdire totalement. Mais rien n’est moins sûr. Pour le bitcoin, l’année 2018 est celle de l’épreuve de vérité.
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