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jeudi 19 décembre 2013

La chronique économique : Le grand retour du charbon

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Le Quotidien d'Oran, mercredi 18 décembre 2013
Akram Belkaïd, Paris

On le croyait passé de mode mais il est toujours là et, plus encore, il va falloir compter sur lui durant les prochaines années, voire les prochaines décennies. Selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), le charbon est une ressource énergétique primaire de plus en plus consommée ( 2,7% de croissance par an jusqu’en 2018 contre 3,4% pour la période 2007-2012). Plus important encore, cette matière première fossile, symbole de la révolution industrielle du dix-neuvième siècle, et donc d’une période que l’on croyait révolue, devrait même détrôner le pétrole d’ici 2015 en tant que principale source énergétique.
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ABONDANT ET BON MARCHE
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Les facteurs qui expliquent cette renaissance du charbon sont nombreux. Il y a notamment l’incontournable « facteur chinois » puisque l’ex-Empire du Milieu compte pour la moitié de la consommation mondiale (cette dernière a atteint 7,7 milliards de tonnes en 2012) et pour 60% de sa hausse. On le sait, la croissance chinoise est dévoreuse d’un grand nombre de commodités et le charbon lui permet de compenser ses difficultés d’approvisionnement en hydrocarbures. Au-delà des discours sur la diversification du mix-énergétique et le développement des sources alternatives ou du nucléaire, Pékin a encore besoin du charbon et cela restera le cas jusqu’au moins 2030.

Une autre raison est que le charbon est une matière abondante et très facile d’accès. Contrairement au pétrole qui se trouve souvent dans des régions instables comme le Proche-Orient ou le Golfe de Guinée, il est présent en grandes quantités en Europe (notamment dans l’est) ou en Amérique du Nord. De plus, les réserves mondiales sont estimées à au moins cinq siècles de consommation actuelle ce que l’on a eu tendance à oublier au plus fort de l’essor pétrolier.

Enfin, l’attrait pour le charbon s’explique aussi par l’émergence du gaz de schiste aux Etats-Unis. De plus en plus indépendante sur le plan énergétique, l’Amérique est en train de réduire sa consommation de charbon, notamment pour ce qui est de la production électrique, ce qui pousse les prix du combustible noir à la baisse. Du coup, nombre d’opérateurs, entre autres européens, en profitent pour alimenter leurs centrales électriques. Dans le même temps, certains pays comme l’Allemagne ont même décidé de rouvrir des mines fermées dans les années 1980, époque où il était de bon ton de présenter le charbon comme une ressource du passé.
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UN COUT ENVIRONNEMENTAL ELEVE
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Bien entendu, cette renaissance de la houille a un prix élevé en matière de détérioration de l’environnement et d’explosion des émissions de gaz à effet de serre. Malgré les promesses des producteurs d'énergie, rien n’a été fait pour développer des technologies propres pour l’exploitation du charbon et le rendement des centrales énergétiques qui l’utilisent comme combustible restent inférieurs à 50%. Plus grave encore, les recherches en ce sens ne sont guère nombreuses, l’essentiel des efforts s’étant concentré sur les énergies alternatives ou encore le pétrole et le gaz de schiste.
La lutte contre le réchauffement climatique risque donc d’être la grande victime du retour en force du minerai noir.
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