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lundi 26 mai 2014

La chronique économique : L’euro trop fort

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Le Quotidien d'Oran, mercredi 21 mai 2014
Akram Belkaïd, Paris
 
Jusqu’où l’euro va-t-il monter par rapport au dollar américain ? C’est la question récurrente que se posent nombre de responsables européens qui s’inquiètent de plus en plus de la vigueur de leur devise. Dans le détail, la monnaie unique est proche actuellement de la barre de 1,40 dollar ce qui la place à un plus haut depuis l’automne 2011. Du coup, le débat à propos d’un possible pic à 1,45 dollar voire 1,50 dollar est relancé sur fond de bataille électorale pour le scrutin du 25 mai prochain.
 
Peu de marges pour la BCE
 
Mais quel est le problème posé par un euro fort ? Plusieurs pays de l’Union européenne (UE) se plaignent d’abord que cela handicape leurs exportations par rapport à leurs concurrents américains ou asiatiques. Certes, cela ne concerne pas l’Allemagne dont la renommée planétaire du fameux « made in Germany » est un avantage précieux qui compense des prix plus élevés. Mais des pays comme la France, l’Italie, l’Espagne ou même les Pays-Bas sont pénalisés surtout en ce qui concerne leurs produits bas-de-gamme. La conséquence pour eux est connue, plusieurs de leurs entreprises étant poussées à délocaliser une partie de leurs activités en zone dollar et cela afin de diminuer leurs coûts de production.
 
Dans le même temps, la vigueur de l’euro pose problème dans un contexte où l’inflation est très faible et où l’économie a du mal à redémarrer. En soi, le fait qu’une monnaie soit un rempart contre la hausse des prix n’est pas une mauvaise chose. Mais, quand cela contribue à augmenter les menaces de déflation voire de stagflation, cela devient inquiétant. En effet, de nombreux économistes européens craignent que les économies du Vieux Continent ne tombent dans le piège de la stagnation (panne de l’activité économique) doublée d’une chute drastique des prix (causée par la faiblesse de l’inflation qui finit par conduire à la déflation). Dans ce genre de situation, les entreprises, faute de commandes et de revenus suffisants, font faillite et sont obligées de licencier.
 
Du coup, c’est la Banque centrale européenne (BCE) qui est priée de réagir puisque c’est à elle que revient de conduire les politiques liées à l’euro. Problème, l’institution monétaire basée à Francfort n’a que très peu de marges de manœuvres. Ses taux directeurs sont déjà très faibles (baisser les taux peut contribuer à déprécier une monnaie) et, de toutes les façons, l’Allemagne ne veut ni d’un euro faible ni d’un regain d’inflation ne serait-ce que pour préserver les avoirs de ses épargnants. Le 5 juin prochain, les gouverneurs de la BCE seront donc attendus au tournant lors de leur réunion mensuelle. Non seulement, ils devront rendre publiques leurs prévisions de croissance et d’inflation mais aussi, et surtout, clarifier leurs intentions vis-à-vis de la valeur de l’euro.
 
Le tabou de la dévaluation
 
Bien entendu, il est pratiquement exclu d’entendre un jour les dirigeants de la Banque centrale européenne évoquer la question d’une dévaluation pure et simple. Ce genre d’option n’est pas prévu, du moins pas de manière explicite, par les textes qui régissent l’Union monétaire européenne. Pourtant, les exportateurs du Vieux continent auraient bien besoin d’un petit coup de pouce monétaire. Ce dont ne veulent absolument pas les épargnants (l’Europe est la première zone d’épargne du monde) qui craignent une dépréciation de leurs avoirs. La BCE devra donc faire avec ce qu’elle a, c’est-à-dire pas grand-chose.
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