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dimanche 20 janvier 2019

La chronique économique : L’euro et ses vingt ans

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Le Quotidien d’Oran, mercredi 2 janvier 2019
Akram Belkaïd, Paris

Vingt ans, le bel âge… Le 1er janvier 1999, l’euro devenait officiellement la monnaie de 11 pays : Allemagne, Autriche, Belgique, Espagne, Finlande, France, Irlande, Italie, Luxembourg, Pays-Bas et Portugal. Durant trois années, la devise européenne ne fut utilisée que pour les transactions immatérielles. Ce n’est que le 1er janvier 2002 qu’elle fut introduite sous forme de coupures et de pièces. Mais dès 1999, l’euro fut la monnaie de référence pour les transactions financières et boursières. Il fut aussi très vite comparé au dollar et à d’autres devises comme le franc suisse, le yen japonais ou la livre sterling (la Grande-Bretagne, comme la Suède et le Danemark ont refusé de faire partie de la zone euro).

La monnaie européenne a survécu

Vingt ans plus tard, où en est le symbole de l’intégration européenne ? Le premier constat est que l’euro existe encore. Cela peut paraître une évidence mais il faut rappeler que les doutes étaient nombreux à sa naissance. On se demandait alors combien de temps les membres de la zone euro allaient faire preuve de discipline budgétaire afin de donner de la crédibilité à cette monnaie. De fait, en vingt ans, l’euro a survécu à plusieurs crises et doutes. Après une très décriée période de faiblesse vis-à-vis du dollar, il a vite passé le seuil symbolique de la parité et, depuis, il a toujours été supérieur au taux de 1 euro pour 1 dollar.

A la fin des années 2000, la devise européenne a surmonté une crise majeure dont elle fut, d’une certaine manière, la cause. En effet, au début du siècle, la Grèce, membre de l’Union européenne (UE) a multiplié les « manipulations » comptables et budgétaires pour pouvoir entrer dans la zone euro. Cette entrée se réalisé en 2001 (la Grèce fut suivie par la Slovénie en 2007, Chypre et Malte en 2008, la Slovaquie en 2009, l’Estonie en 2011, la Lettonie en 2014 et la Lituanie en 2015). Mais les comptes trafiqués de la Grèce, avec l’appui de grandes banques d’affaires et l’aval implicite de plusieurs capitales européennes qui ne pouvaient ignorer la situation (cas de l’Allemagne et de la France), ont conduit à une grave crise de la dette publique grecque en 2009.

Cette dernière a finalement été surmontée tout comme celle liée aux créances pourries charriées par les marchés et les grands acteurs financiers européens. Pour éviter une grave crise bancaire et pour sauver l’euro, la Banque centrale européenne (BCE), très critiquée parce qu’elle ne se préoccupe guère de la croissance, a lancé un programme de rachat de dettes d’un montant de 2 600 milliards d’euros. Pour dire les choses de manière crue, l’institution européenne s’est transformée en fonds spéculatif pour sauver la devise européenne. Les conséquences de cette politique peu orthodoxe se feront connaître tôt ou tard et c’est peu dire que cela inquiète les économistes.

Le dollar reste roi

Quoi qu’il en soit, l’euro a atteint aujourd’hui une dimension internationale. C’est une monnaie de transactions mais aussi d’émissions sur les marchés. Par contre, le dollar reste roi pour ce qui est des monnaies de réserves (60% des réserves de change mondiale contre 20% pour l’euro). De même, le billet vert est omniprésent dans tous les circuits d’échanges et de transactions et le remplacer par l’euro est chose impossible. C’est ce qui explique pourquoi les Etats-Unis peuvent menacer de sanctions n’importe quel pays dans le monde. En effet, il suffit d’utiliser une seule fois le dollar (même en dehors des Etats-Unis) pour tomber sous le coup de la loi américaine. L’euro, encore jeune, n’est donc pas une alternative totale au billet vert et dépend surtout de l’évolution de l’intégration européenne. Si, demain, apparaît un marché unique de la dette européenne, alors il est possible que l’euro gagne encore plus en influence mondiale.
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